Licenciement, trou de revenus, paperasse à gérer… Si l’entreprise dépose le bilan alors que vous êtes déjà en arrêt maladie, le choc est brutal. Pourtant, la loi encadre chaque étape : votre contrat reste valable jusqu’au licenciement, des indemnités sont garanties et plusieurs acteurs – liquidateur, AGS, CPAM, France Travail – se relaient pour éviter la coupure nette de revenus. Ce guide, construit étape par étape, clarifie vos droits et les démarches à mener pour sécuriser votre situation professionnelle et financière.
Dépôt de bilan et arrêt maladie : de quoi parle-t-on exactement ?
Dans le langage courant, « dépôt de bilan » renvoie à la déclaration de cessation des paiements que l’employeur dépose au greffe. Le tribunal de commerce ouvre ensuite :
- un redressement judiciaire (l’activité continue sous surveillance), ou
- une liquidation judiciaire (arrêt ou cession totale de l’activité).
Si vous êtes déjà en arrêt maladie, retenez deux points :
- Le contrat est suspendu, jamais rompu par la seule maladie.
- En liquidation, un licenciement économique reste possible, même pour un salarié absent, dès lors que le motif est réel et sérieux (art. L1233-3 C. trav.).
Contrat suspendu ≠ protection absolue : votre statut pendant la procédure
Tant que le médecin renouvelle l’arrêt, vous restez salarié. La suite dépend du type de procédure :
- Redressement judiciaire : si le plan le permet, l’employeur (sous contrôle du mandataire) peut maintenir votre poste.
- Liquidation judiciaire : le tribunal nomme un liquidateur qui dresse la liste des contrats et enclenche les licenciements – souvent dans les 15 jours suivant le jugement.
La Cour de cassation rappelle qu’on ne peut pas vous licencier à cause de la maladie. La protection tombe seulement si l’activité ferme ou si aucun reclassement n’est possible.
Indemnités de licenciement : qui paie quoi, et quand ?
Le licenciement économique ouvre droit à quatre indemnités, prises en charge par l’AGS si la trésorerie de l’entreprise manque :
- Indemnité légale de licenciement (ou conventionnelle si plus favorable).
- Indemnité compensatrice de préavis : due même si vous êtes dispensé de travailler.
- Indemnité compensatrice de congés payés.
- Salaires impayés des six derniers mois.
Les versements arrivent en moyenne sous 4 à 6 semaines après réception du relevé des créances par l’AGS. Conservez bulletins de paie, contrat et notification de licenciement : ils servent de preuves.
Arrêt maladie : vos indemnités journalières continuent-elles ?
Oui. La CPAM poursuit le versement des indemnités journalières (IJ) tant que l’arrêt est valable. Vos réflexes :
- Envoyer les volets de prolongation à la CPAM sous 48 h.
- Joindre une copie de la lettre de licenciement pour mettre à jour le dossier.
- Après le licenciement, transmettre les derniers bulletins de salaire ou, à défaut, l’attestation AGS.
À la fin de l’arrêt, l’allocation chômage peut prendre le relais ; la CPAM et France Travail vérifient qu’il n’y a pas de chevauchement.
Maladie professionnelle ou accident du travail : droits renforcés
Si l’arrêt est lié à une maladie professionnelle ou un accident du travail :
- Les IJ sont majorées : 60 % puis 80 % du salaire de référence.
- Après consolidation, vous pouvez prétendre à une rente ou un capital selon le taux d’incapacité permanente (IPP).
- Ces créances sont privilégiées : pas de déclaration à faire, l’AGS se substitue automatiquement si la masse active est insuffisante (art. L1226-17 et L3253-15 C. trav.).
Checklist express des démarches pour le salarié
Vous venez de recevoir la lettre ? Suivez ce parcours :
- Réception de la lettre : notez la date, gardez l’enveloppe.
- CPAM : transmettez la copie + vos volets d’arrêt.
- Liquidateur : vérifiez l’enregistrement de vos créances (coordonnées sur la lettre).
- Relance AGS si rien n’arrive après six semaines.
- Inscription France Travail : possible dès la fin officielle du contrat, même si l’arrêt continue. Les droits chômage seront activés une fois déclaré apte.
- Prud’hommes : envisagez un recours si le motif du licenciement est contestable ou si des sommes manquent.
Questions fréquentes
1. Puis-je être convoqué à un entretien préalable pendant mon arrêt ?
En liquidation, non : la procédure est simplifiée, sans entretien. En redressement, l’entretien demeure obligatoire mais peut être écrit ou reporté.
2. Le dépôt de bilan est-il un motif de licenciement ?
Pas directement : la cause réelle est l’impossibilité de maintenir le poste ou l’arrêt de l’activité.
3. Que faire si le liquidateur « m’oublie » ?
Envoyez-lui un courrier RAR, puis contactez l’AGS avec vos pièces. Vous pouvez aussi informer l’Inspection du travail.
4. Les IJ sont-elles déduites du préavis ?
Non. Vous percevez l’indemnité de préavis et les IJ. L’allocation chômage démarre après la fin théorique du préavis.
5. J’ai moins d’un an d’ancienneté : ai-je droit à une indemnité ?
L’indemnité légale est due à partir de huit mois d’ancienneté continue. Sinon, seules les compensations de préavis et de congés payés sont versées.
Ressources utiles
- Site officiel de l’AGS : simulateur d’indemnités, formulaires.
- Service-public.fr : fiches pratiques liquidation et licenciement économique.
- ameli.fr : démarches CPAM, arrêt de travail et IJ.
- France Travail : 3949 (appel gratuit).
Un dépôt de bilan pendant un arrêt maladie n’entraîne donc pas la disparition totale de vos ressources. En vous appuyant sur le liquidateur, l’AGS et la CPAM, vous protégez vos droits et transformez cette période d’incertitude en transition gérée vers la reprise ou un nouveau projet professionnel.