Argent et amour font rarement bon ménage quand il s’agit de toucher aux dynamiques traditionnelles au sein des couples. Une récente étude menée par l’Institut national d’études démographiques (Ined) révèle une réalité troublante : le risque de séparation augmente lorsque la femme gagne plus que son mari.
Quand la femme gagne davantage : le couple sous tension
C’est une situation de plus en plus fréquente dans une société où les femmes progressent sur le plan professionnel : la femme dépasse son mari sur le plan salarial. Selon les spécialistes Giulia Ferrari, Anne Solaz et Agnese Vitali, cette situation bouscule les normes traditionnelles au point de fragiliser certains couples.
En France, le phénomène est particulièrement flagrant. L’étude met en lumière que le risque de séparation devient notable lorsque la femme contribue à plus de la moitié des revenus totaux du couple. « Cet écart par rapport au modèle traditionnel, où l’homme est le principal pourvoyeur de revenus, favorise des tensions susceptibles de conduire à des ruptures », explique Giulia Ferrari.
Des chiffres révélateurs d’une évolution
Le constat est sans appel : lorsque la femme représente plus de 55 % des revenus du ménage, le risque de séparation bondit entre 11 % et 40 % par rapport aux couples où la répartition des revenus est inversée. Cette tendance va de pair avec l’évolution des rôles au sein des foyers. En effet, en 2017, dans un quart des couples français, la femme gagnait plus que l’homme, un chiffre en progression de cinq points comparé à quinze ans plus tôt.
Cette évolution économique reflète l’émancipation financière des femmes, mais semble également perturber les équilibres traditionnels sur lesquels reposent encore bon nombre de ménages. Les auteurs de l’étude pointent également que cette dynamique pourrait engendrer des conflits liés à l’insatisfaction conjugale ou une perception inégalitaire dans le partage des tâches domestiques.
Les jeunes moins sensibles à ces tensions
Fait intéressant, les jeunes couples semblent moins affectés par cette problématique. Dans la tranche des 20-29 ans, l’impact des inégalités de revenus sur la stabilité du couple est bien moins prononcé. Cela pourrait s’expliquer par une vision plus moderne et moins genrée des rôles dans le couple chez les nouvelles générations, comparée aux générations précédentes.
Un schéma différent selon le type d’union
Autre point notable : la nature même de l’union influence également la probabilité de séparation. Les couples mariés, par exemple, restent davantage ancrés dans une structure « traditionnelle », où l’homme gagne souvent plus que sa partenaire. À l’inverse, dans les unions libres ou les couples pacsés, les écarts de revenus sont plus fréquents et peuvent potentiellement être mieux acceptés.
L’argent comme levier ou obstacle
L’étude questionne également les influences financières sur les décisions de séparation. Une femme bénéficiant d’une indépendance financière peut trouver plus facilement les moyens émotionnels et matériels de quitter un conjoint avec qui elle est insatisfaite. Cependant, l’argent peut aussi être un frein à la séparation pour des couples où la dépendance économique est forte.
Ce constat met en lumière un paradoxe : si l’émancipation financière peut offrir une plus grande liberté individuelle, elle peut également exacerber des tensions dans un modèle de couple qui ne s’est pas détaché des normes sociales traditionnelles.
Conclusion : une remise en question des équilibres de couple
En définitive, cette étude soulève une problématique contemporaine majeure : comment concilier égalité professionnelle et stabilité conjugale ? Si les mentalités évoluent, le poids des normes sociales et des attentes traditionnelles reste profondément ancré, créant des zones de friction. La clé résiderait peut-être dans une redéfinition des rôles au sein du couple, permettant de dépasser ces antagonismes pour construire des relations plus harmonieuses, indépendamment des revenus.